L’exécution filmée d’un jeune homme relance le débat sur le phénomène “bébés noirs”
Les habitants de l’arrondissement 6 Talangaï de Brazzaville ont une fois de plus vécu une scène de violence inédite. Le lynchage d’un jeune homme par des adolescents armés d’armes blanches communément appelés “bébé noirs”.
Le lundi 08 février à Brazzaville dans l’arrondissement 5 Talangaï, plus précisément aux abords du lycée Thomas Sankara vers 17h, un jeune homme a été pris à parti par un groupe d’individus armés d’armes blanches (machette, couteau, pierre,…) entraînant la mort de ce dernier.
Cette scène d’une rare violence, qui montre des adolescents exécutant de sang-froid le jeune homme, a été filmée par un habitant du quartier. La vidéo postée sur les réseaux sociaux ravive le débat relatif au phénomène des “bébés noirs” à quelques semaines de la présidentielle.
Présent depuis quelques années sur le territoire congolais, ce phénomène principalement représenté par deux gangs “Américains” et “Arabes” a pris de l’ampleur au fil des années occasionnant la mort de plusieurs individus tant à Pointe-Noire qu’à Brazzaville. Cette situation est source d’insécurité et de nature à accroître le niveau de violence dans les villes congolaises.
En 2017, faisant déjà plusieurs victimes, les autorités congolaises avaient lancé une opération de lutte contre ce phénomène “bébés noirs” ayant conduit à l’arrestation de plusieurs membres des gangs. Depuis, des opérations régulièrement conduites par les forces de l’ordre et quelques autorités locales n’ont pas suffit à éradiquer ce phénomène.
Au contraire, le constat montre que la problématique prend de l’ampleur, et les populations et les autorités se renvoient la responsabilité.
Répondant à l’interpellation des sénateurs, en octobre dernier, Raymond Zéphirin Mboulou avait remis en cause le rôle de certains parents démissionnaires qui, selon lui, favorisent le développement du phénomène dit des “bébés noirs”. « Quand les parents laissent les enfants dans la rue, voilà le résultat, vous n’allez pas remettre [la faute, ndlr] sur la force publique, c’est d’abord l’éducation des parents. », a-t-il souligné.
Un point de vue soutenu par une partie de l’opinion, « nombre de ces bébés noirs sont clairement connus dans les quartiers et même protégés par leurs familles », affirme Astrid, habitante de l’arrondissement 4 Loandjili à Pointe-Noire où le phénomène est particulièrement présent.
Lors de son discours du 17 décembre 2019, le Président de la République Denis Sassou Nguesso avait appelé à la responsabilité des tuteurs dans la gestion de la problématique de la délinquance juvénile, « La loi s’appliquera certes. Mais ce sont nos enfants. Je place donc les parents devant leurs responsabilités. », avait-il déclaré.
Le ministre de l’Intérieur avait, quant à lui, averti que des sanctions pourraient à l’avenir être prises à l’encontre des parents dont les enfants mineurs seraient identifiés comme appartenant à ces réseaux criminels.
Les autorités publiques ayant pour mission d’assurer la sécurité des biens et des personnes sur l’ensemble du territoire national devraient se pencher avec un grand intérêt sur la question en vue d’éradiquer ce phénomène croissant. La question se pose alors sur le sort réservé à ces derniers.
La traque et l’arrestation de ces individus, âgés entre 13 et 30 ans, étant certes une priorité, les acteurs de la société civile ont proposé en 2017 une réinsertion sociale de ces “bébés noirs” en vue de s’assurer qu’ils ne replongent plus dans la violence à la sortie de prison.