Interview

Zina Hope coqueluche ponténégrine de la musique congolaise

Nous sommes allés à Pointe-Noire à la rencontre de l’artiste Zina Hope. La jeune coqueluche de la musique congolaise qui a pris le pari de rester elle-même en se lançant dans la musique Pop-Rock. Un style pour le moins décalé dans l’environnement musical congolais, qui reste dominé par la rumba et les musiques urbaines. C’est dans un contexte marqué par la crise sanitaire du Covid-19 et ses répercussions sur le milieu artistique local, que nous avons échangé avec elle sur son histoire, le climat actuel dans le showbiz congolais, et ses perspectives.

1. Qui est Zina Hope ? 

Depuis ma naissance à Brazzaville, j’ai atteint, à Pointe-Noire où j’ai grandi, mon quart de siècle sur la terre au début du mois de juillet. J’ai commencé à chanter il y a deux ans seulement, quand je dis commencer c’est vraiment commencer, je n’avais jamais chanté avant, même pas à l’église !  Le déclic, ça été ma rencontre avec Philippe Edouard, qui est l’auteur et compositeur de mes chansons, mon manager également. Cela a véritablement changé ma vie et grâce à des contrats d’images avec TNT AFRICA puis ensuite la BCI Congo, j’ai pu me consacrer à ma nouvelle vie d’artiste. Elle est riche de rencontres et d’expériences, j’ai été animatrice d’une émission musicale pendant une année sur Canal 2, j’ai co-réalisé deux documentaires qui sortiront au second semestre 2020. Je m’éclate ! Quant à mon style musical, il va de la chanson à la pop et même un peu plus loin jusqu’au rock. Quel que soit le style, je suis toujours très attachée au texte, j’aime qu’il ait du sens. 

2. Vous vous illustrez dans un style musical plutôt peu répandu au Congo on vous a d’ailleurs surnommée « La Vanessa Paradis du Congo » peut-on dire que le style « Pop” séduit le public congolais ? Comment mettez-vous ce style musical au goût du public local ?

« La Vanessa Paradis du Congo » est un surnom qui m’a été donné lors de mes premiers passages télé, ça m’a fait sourire. C’est sans doute parce que je n’avais que 22 ans à mes débuts et que ma chanson « Chez moi j’ai des bananes » apportait une nouvelle fraicheur musicale. Ce côté « pop » a sans doute séduit, et j’ai été étonnée qu’en une seule publication sur ma page Facebook, cette chanson atteigne 10 000 vues en une semaine. C’était peut être l’effet surprise car je ne crois pas que ce genre musical séduise forcément le public congolais dans sa majorité. Ici, il y a d’un côté la Rumba, les musiques traditionnelles du Congo, la chanson chétienne et, de l’autre, le Rap ou R&B. Moi je suis à côté de la plaque, je n’entre dans aucune case et je me mets même toute seule des bâtons dans les roues à ne pas vouloir jouer sur l’image d’une fille sexy [Rires]. J’avance donc telle que je suis, simplement et sans artifice, en étant une jeune femme ordinaire qui parle du quotidien de nos vies au Congo.

3. Vous avez eu une relation privilégiée avec la légende Nganga Edo, quels souvenirs gardez vous de l’artiste et de la personne ?

Ah le vieux Edo ! Un amour ! J’ai été séduite, dès les premiers instants de notre première rencontre, séduite par sa gentillesse, sa simplicité et sa joie de vivre. J’ajouterai même par sa jeunesse. Son humilité devrait être un exemple pour tous les musiciens. J’ai été chanceuse d’avoir eu le privilège de le connaître et d’avoir partagé à plusieurs moments son quotidien, sa vie de famille ou celle de chef de quartier. Chanceuse également d’avoir chanté avec lui « Aimée wa bolingo », franchement c’était une pure émotion. J’ai d’ailleurs enregistré en solo cette chanson à Pointe-Noire pour lui rendre hommage, un hommage que j’ai voulu aussi souriant que possible, aussi souriant qu’était le « Patriarche ». Je n’ai pas de tristesse quand je pense à Edo, il était aimé de tous, il a eu une belle et longue vie, une belle mort, alors non, ce n’est pas de la tristesse c’est juste un grand manque, un grand manque de lui. 

4. Le contexte actuel est marqué par la crise sanitaire du Covid-19, quel est son impact sur le milieu musical au Congo, en général ?

Il y a une grande partie de la population qui est au bord du gouffre en raison de cette crise et c’est à tous ces gens véritablement démunis que je pense en premier. Pour ma part, en tant qu’artiste, c’est surtout de la frustration. Elle est d’autant plus grande que j’avais énormément travaillé avec mes musiciens et choristes pour avoir un répertoire d’une heure et enchaîner les concerts. Cela faisait deux ans que j’attendais ça avec impatience et mon élan s’est coupé net après deux concerts seulement. J’imagine la même frustration pour le milieu musical. Il y a naturellement un grand manque à gagner mais surtout un grand manque à pouvoir jouer. Je veux garder à l’esprit que nous avons cette chance de pouvoir encore rester présents sur les réseaux sociaux. Plutôt que se plaindre je crois que notre devoir est de positiver. 

5. Plusieurs personnes disent qu’il y aura un avant et un après-coronavirus, comment envisagez vous « l’après » dans l’industrie musicale congolaise ?

Je ne me pose pas trop la question, peut être parce que la vie d’artiste nous apprend à vivre au jour le jour. Et puis je ne suis pas assez naïve pour croire qu’il y aura un véritable changement dans l’industrie musicale. D’ailleurs, je ne sais même pas si il y a une industrie musicale [Rires] ! Je m’attends donc qu’après soit comme avant avec pour seule différence que ce sera, pour les artistes, une vraie délivrance de revenir à une normalité. J’imagine qu’il y aura beaucoup de concerts parce que la passion est la plus forte et beaucoup moins d’argent pour les organiser. Pour le reste, on sait que la vie d’artiste au Congo c’est s’amuser d’une certaine façon à foncer droit dans le mur. J’ai l’insouciance de la jeunesse pour y aller joliment.

6. Quelle est votre actualité (vos projets en cours) ?

L’actualité se résume presque à cet espoir de remonter le plus tôt possible sur la scène. Actuellement j’adapte certaines de mes chansons en reggae et je répète chaque semaine avec Conquering Lions, une formation de reggae de Pointe-Noire, pour un concert à La Pyramide dès que les spectacles seront autorisés. Jouer avec des rastas c’est vraiment cool, je suis super contente, d’autant plus que je n’ai jamais chanté avec une section cuivres. J’ai aussi 3 nouvelles chansons à maquetter, « Il pleut des cordes », « Un zèbre sans rayure » et « Pointe-Noire-Paris-Paradis », des titres qui tendent vers le rock. Sans compter que je m’impatiente d’avancer plus encore sur mon album « Je suis en route » qui traîne véritablement en route [Rires] ! 

7. Un mot de fin adressé aux artistes et mélomanes dans ce contexte de crise, rappelons que les salles de spectacles restent, à ce jour, fermées.

J’ai retenu cette phrase du philosphe Nietzshe : «  La vie sans musique est une erreur, une fatique, un exil ». Aujourd’hui la musique live est certes entre parenthèses mais je ne vois pas autour de moi de signes de découragement des artistes. Nous sommes là, prêts à bondir ! Le mot de la fin sonne comme un rappel lors d’un concert, c’est  toujours le plaisir que l’on partage avec le public !  

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